Le Liban se dirige vers « l’enfer » si un nouveau gouvernement n’est pas formé dans les plus brefs délais, a averti lundi le chef de l’Etat Michel Aoun, alors que le processus de formation d’un cabinet semble dans l’impasse.
« Nous sommes confrontés à une crise de formation d’un gouvernement, ce qui n’était pas censé se produire car les échéances qui attendent le Liban ne permettent pas de perdre une seule minute », a affirmé M. Aoun, 85 ans, l’air fatigué, le verbe hésitant.
Les partis politiques libanais s’étaient engagés début septembre à former un cabinet « de mission » composé de ministres « compétents » et « indépendants » dans un délai de deux semaines pour sortir le pays du marasme économique, avait annoncé le président français Emmanuel Macron lors d’une visite à Beyrouth.
Mais le processus piétine en raison de divergences sur l’attribution de portefeuilles ministériels.
Le principal obstacle vient du refus de Moustapha Diab d’accorder le portefeuille des Finances au tandem chiite formé du Hezbollah et d’Amal. Une demande rejetée en bloc par leurs détracteurs, dont l’ancien Premier ministre sunnite Saad Hariri. Les deux partis chiites entrevoient une tentative de contourner les résultats du scrutin parlementaire de 2018 et de les écarter du pouvoir. Une exigence américaine.
« Avec le durcissement des positions, il ne semble pas y avoir de solution à l’horizon, car toutes les solutions proposées impliquent des gagnants et des perdants », a regretté le président Aoun. Faute d’accord, le Liban se dirigera « vers l’enfer », a-t-il prévenu.
Le chef de l’Etat a assuré que « les blocs parlementaires ne devaient pas être écartés » du processus, en allusion à la démarche entreprise par le Premier ministre désigné Moustapha Adib qui refuse toute consultation préalable avec les blocs parlementaires pour le choix des ministres comme ce fut le cas ces dernières années. Néanmoins, Saad Hariri qui préside un bloc parlementaire fait part aux désignations.
En outre, M. Aoun a souligné qu’aucun ministère ne devait être attribué à une communauté spécifique d’après la Constitution. Une idée qui avait été aussi défendue le dimanche par le patriarche maronite Mgr Bechara Raï. Elle a été objectée avec virulence de la part du Conseil chiite suprême et du mufti Jaafarite. Les deux ayant rappelé qu’aucun poste officiel ne l’était non plus, ce qui n’empêche pas la distribution communautaire à tous les niveaux de la fonction publique. Dont celui du chef de l’Etat qui revient aux maronites.
Initiative française
Plus tôt dans la journée de ce lundi, Moustapha Adib avait demandé « la coopération de toutes les parties afin de faciliter la formation d’un gouvernement de mission avec un programme spécifique ».
Dans un communiqué, il a appelé toutes les forces politiques à « œuvrer immédiatement et sans délai pour le succès de l’initiative française, qui ouvre la voie au sauvetage du Liban et met fin à la détérioration accélérée » de la situation générale du pays.
Le Liban vit depuis un an l’une des pires crises économiques, sociales et politiques de son histoire, marquée par une dégringolade de sa monnaie nationale, une hyperinflation et une paupérisation à grande échelle de la population.
La crise a été amplifiée par la pandémie de Covid-19 et l’explosion tragique le 4 août au port de Beyrouth, qui a catalysé la mobilisation de la communauté internationale.
La communauté internationale, particulièrement la France, exige du Liban des réformes structurelles en contrepartie d’un soutien international de plusieurs milliards d’euros.
Source: Avec AFP