Des frappes aériennes et des explosions ont secoué samedi Khartoum faisant des morts parmi les civils, alors que les habitants du Darfour (ouest) continuent à fuir les violences, plus de deux mois après le début de la guerre au Soudan entre l’armée et les paramilitaires.
Les combats opposant l’armée du général Abdel Fattah al-Burhane aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), dirigés par le général Mohamed Hamdane Dagalo, ont plongé ce pays d’Afrique de l’Est, l’un des plus pauvres au monde, dans une crise inextricable. A Khartoum, les frappes aériennes se sont intensifiées ces deux derniers jours, ont affirmé des témoins à l’AFP.
Samedi, elles ont de nouveau visé des quartiers résidentiels du sud de la capitale, causant la mort de « 17 civils incluant cinq enfants » et en blessant « 11 autres », selon le comité de résistance local, une des cellules militantes qui organisent l’entraide entre les habitants de Khartoum. A ce stade, l’AFP n’a pas été en mesure de confirmer ce bilan auprès de sources indépendantes.
Les FSR, qui accusent l’armée de cibler spécifiquement des quartiers résidentiels, ont affirmé avoir abattu samedi un avion de chasse de l’armée. Sur une vidéo partagée par les paramilitaires sur Twitter samedi, on peut voir des maisons en briques détruites et des couvertures qui recouvrent ce qui semble être des cadavres.
Médiation « par les balles »
« Les balles feront office de médiation » entre l’armée et les paramilitaires, a déclaré le général Yasser Atta, adjoint du chef de l’armée, dans une vidéo publiée vendredi sur le compte Facebook de l’armée regulière. Des tirs avec « divers types d’armes » ont également été signalés par des habitants du sud de Khartoum, tandis que dans la banlieue nord résonnent des « tirs de roquettes et d’artillerie lourde », ont affirmé des témoins à l’AFP.
Dans ce chaos, des quartiers entiers de la capitale sont privés d’eau potable et l’électricité ne fonctionne que quelques heures par semaine. La situation est tout aussi alarmante dans la région du Darfour, où « la violence fait rage », a alerté samedi l’ONG Médecins sans frontières (MSF).
Les témoignages sur des violences de grande ampleur contre les civils s’y multiplient, et selon l’ONU, plus de 149.000 personnes ont fui vers le Tchad depuis le début des combats le 15 avril. Rien que ces derniers jours, « 6.000 personnes ont fui la ville d’El-Geneina » (Darfour-Ouest), pour trouver refuge dans la ville d’Adré au Tchad, a indiqué MSF samedi. « La situation est franchement accablante », affirme le Dr Seybou Diarra, coordinateur de MSF pour la région d’Adré.
Désastre humanitaire au Darfour
Déjà dévastée dans les années 2000 par une guerre civile particulièrement sanglante, cette vaste région de l’Ouest du Soudan se dirige vers un nouveau « désastre humanitaire » que le monde doit empêcher, a plaidé jeudi le responsable de l’ONU pour les affaires humanitaires, Martin Griffiths.
Le chef de la mission de l’ONU au Soudan, Volker Perthes, s’était dit mardi « particulièrement alarmé » par la situation au Darfour où les violences pourraient constituer des « crimes contre l’humanité ». Dans le pays, la situation humanitaire ne fait qu’empirer: les hôpitaux dans les zones d’affrontements ne fonctionnent que partiellement, quand ils ne sont pas fermés.
En deux mois de guerre, plus de 2.000 personnes ont été tuées au Soudan, selon l’ONG ACLED. Plus de 2,2 millions de personnes ont fui le pays, selon l’ONU. Malgré des tentatives de médiation menées notamment par Ryad et Washington, aucun scénario de retour à la paix n’est en vue. Et les nombreuses trêves annoncées n’ont été quasiment jamais respectées. L’aide humanitaire est restée bloquée ou est parvenue aux civils en quantités très insuffisantes.
Vingt-cinq millions des 45 millions d’habitants du Soudan dépendent désormais de l’aide humanitaire pour survivre, selon l’ONU. Une conférence internationale sur l’aide au Soudan parrainée par l’Arabie saoudite est prévue le 19 juin à Genève.
Source: Avec AFP