La ville syrienne d’Idleb et sa campagne vivent dans l’angoisse suite à une nette recrudescence de l’activité des cellules de Daech (État islamique-EI). Cette recrudescence se manifeste par la distribution de tracts portant des slogans et des menaces, profitant du vide sécuritaire qui règne dans les zones contrôlées par le gouvernement intérimaire syrien.
L’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH) a constaté que des tracts ont été distribués dans plusieurs quartiers de la ville et dans des localités de sa zone rurale. Ils s’en prennent au gouvernement intérimaire et menacent de retour de Daech et de ses activités.
L’un des tracts affirme : « Ce que vous considérez aujourd’hui comme une libération, et que vous vous empressez de célébrer, n’est rien d’autre qu’un renversement des rôles sous un vernis islamique, et l’islam n’y est pour rien. »
L’OSDH avait déjà observé, le 29 novembre, des slogans similaires inscrits sur les murs d’écoles des villes de Muhkan et d’al-Quriyah, toutes deux sous le contrôle du gouvernement intérimaire à l’est de Deir Ezzor.
Ces slogans contiennent des menaces explicites telles que : « L’État islamique est là pour rester » et « On arrive, chiens de la coalition ! », ce qui a semé la panique parmi les habitants et laisse penser que des cellules dormantes de l’EI restent actives dans ces zones, selon l’OSDH.
Une cellule démantelée
Ce mercredi, le ministère syrien de l’Intérieur a annoncé le démantèlement d’une cellule terroriste affiliée à Daech, active dans les gouvernorats d’Idleb et d’Alep et responsable de plusieurs attaques contre les forces de sécurité et les patrouilles militaires.
Dans un communiqué, le ministère a précisé que cette opération a permis la neutralisation du chef de la cellule, l’arrestation de huit individus et la saisie d’une importante quantité d’armes et de munitions.
Le communiqué ajoute que l’enquête a révélé l’implication des personnes arrêtées dans trois opérations terroristes : l’attaque contre une patrouille routière à Maaret al-Nu’man, celle contre des militaires du ministère de la Défense sur le pont de Saraqib, dans la campagne d’Idleb, et l’attaque armée contre des douaniers à al-Zarba, dans la campagne d’Alep.
Ces derniers jours, des attaques ont tué 4 membres des Forces de sécurité intérieure et en ont blessé un cinquième dans la ville de Maaret al-Nu’man, au sud d’Idleb. Une autre attaque réalisée contre les forces américaines dans la ville de Tadmor (Palmyre) a tué deux soldats américains, un traducteur civil et un soldat syrien.
Déstabiliser le pouvoir
Selon Abdel Rahman al-Hajj, l’universitaire et le chercheur spécialisé dans les groupes religieux, la stratégie adoptée par l’EI après la chute du régime de Bachar al-Assad visait à empêcher la stabilité du pouvoir du président Ahmed al-Charaa. « Parce que la conquête de territoires n’était plus efficace, et les combats dans le désert et sur de vastes étendues n’avaient pas cet effet, l’EI s’est immédiatement tourné vers l’établissement de cellules dans les villes et a exploité les divisions religieuses et ethniques au sein de la société pour tenter de renforcer ces divisions et d’affaiblir la légitimité révolutionnaire du gouvernement », a-t-il expliqué au site libanais al-Modon.
Et de poursuivre qu’après la signature du gouvernement syrien intérimaire de l’accord d’adhésion à la coalition internationale contre Daech, l’objectif immédiat de l’organisation est devenu de saper la confiance des États-Unis et des pays occidentaux dans le gouvernement du président al-Charaa.
Affaiblir l’alliance avec les USA
Selon l’analyste politique Abdallah al-Hamad, face aux campagnes de sécurité menées par le gouvernement, l’EI a commencé à mener des opérations dans des zones vulnérables sur le plan sécuritaire, comme les régions désertiques et les axes routiers. Hamad insiste sur le fait que « l’organisation ne cherche plus à se reconstituer, mais privilégie les attaques éclair qui créent une instabilité sécuritaire et entravent le développement de l’État syrien ».
La nouvelle stratégie, observée par al-Hamad, a pour objectif de créer des failles de sécurité qui sapent la confiance dans les capacités de sécurité syriennes d’une part, et d’affaiblir l’alliance stratégique entre la Syrie et les États-Unis d’autre part.
L’analyste estime que ce changement stratégique est dû au soutien apporté par la faction Qandil, qui contrôle les Forces démocratiques syriennes (FDS) à l’est de l’Euphrate. Il ajoute que le désert syrien, outre le fait d’être un bastion pour les cellules de l’EI, était également « un terrain propice aux milices iraniennes telles que les brigades Zainabiyoun et Fatemiyoun ».
Déclarations contradictoires
Pour sa part, l’écrivain et chercheur Houssam Jazmati a déclaré à al-Modon que l’appareil sécuritaire gouvernemental était désorienté par l’incident de Tadmor, en raison des déclarations contradictoires d’une part et de la présence, au sein même des forces de sécurité et militaires, d’éléments, voire de groupes, mécontents de la politique du gouvernement envers Washington.
Il souligne que la récente déclaration gouvernementale concernant l’affiliation de l’auteur de cet attentat à l’EI nécessite des preuves, d’autant plus que l’agence de presse A’maq, affiliée à l’EI, a revendiqué toutes les opérations menées avant et après l’incident de Tadmor, sans mentionner son implication dans celui-ci.
Par ailleurs, Jazmati explique que Daech, qui tente de se reconstituer, n’a pas de nouvelle stratégie. Cependant, l’adhésion de la Syrie à la coalition et le lancement de frappes et d’opérations de sécurité contre ses cellules l’ont contraint à riposter par des attaques que l’on pourrait qualifier de suicides, compte tenu de leur impact disproportionné sur ses forces déjà affaiblies.
Manoeuvres américaines
Ce jeudi, des avions de la coalition ont survolé la ville de Mayadine, dans l’est de la Syrie, au moment même où un convoi militaire américain arrivait au pont de la ville, près du village d’al-Hawaij.
Selon l’OSDH, ces événements surviennent dans un contexte de fortes tensions sécuritaires dans la région et d’escalade des activités militaires. Les forces de la coalition mènent des exercices militaires à tirs réels, impliquant des avions de combat, dans le désert proche du champ pétrolier d’al-Omar, dans la campagne orientale de Deir Ezzor.
Source: Divers



