La Syrie ne semble pas du tout se laisser berner par les Turcs dont le champ d’action en Syrie ne cesse de s’élargir. Avec le consentement tacite des Américains et des Français.
Pour la première fois mercredi, des hélicoptères de combat syriens ont bombardé les milices qui combattent dans le cadre de l’offensive turque baptiée « Bouclier de l’Euphrate » , soutenues par la Turquie dans la province nord d’Alep et plus précisément dans la province occidentale de la ville d’Al-Bab frontalière avec la Turquie, ville que cette dernière a placée dans son collimateur de sa conquête.
En même temps, des bombardiers syriens pilonnaient plusieurs positions de la milice wahhabite terroriste Daesh (Etat islamique) dans la localité de Der Hafer, qui se trouve à mi-chemin avec la province de Raqqa.
L’ escalade militaire syrienne dans cette zone a été escortée par un ultimatum adressé par le commandement des opérations sur le terrain des forces alliées de l’armée syrienne aux Turcs, les mettant en garde de s’approcher des lignes de défenses régulières dans la province nord et est d’Alep et les menaçant « d’une riposte forte et ferme s’ils violent les lignes rouges ».
Le journal al-Akhbar indique qu’avant cette escalade militaire syrienne, les Turcs avaient bombardé le village syrien Hassajek qui est sous le contrôle des Forces de la Syrie Démocratique, groupe qui comprend dans sa majorité des combattants syriens kurdes de l’YPG. Et à l’issue duquel l’armée syrienne a publié un communiqué dans lequel elle a mis en garde les avions turcs de répéter les violations et en imputant l’entière responsabilité des séquelles qui en découleraient à Ankara.
Expliquant les raisons pour lesquelles Damas et de ses alliés ont haussé le ton contre Ankara, le journal libanais y voit un message très clair : celui de rejeter « les postulats », ou le statu quo qu’elle tente d’imposer sur le terrain dans le nord et l’est d’Alep, en occupant la ville d’al-Bab. De nombreuses fois, des sources syriennes proches du pouvoir avaient laissé entendre que cette dernière ne sera jamais en dehors des calculs de Damas.
« Ces mises en garde ne sont pas purement médiatiques. D’autant que cette ville comprend dans son sud l’une des plus importantes bases militaires du nord syrien, l’aéroport de Kwayrès. Celui-ci n’est jamais sorti du contrôle de l’Etat syrien, même dans les pires circonstances, lorsque Daesh occupait la région », précise le journal.
Cet aéroport est d’autant plus important qu’il permet aux forces régulières une ouverture vers la localité de Tal Aafar, ce qui devrait couper la voie devant les Turcs vers la province de Raqqa, fief de Daesh.
A la lumière des récentes déclarations, cette dernière est devenue la cible des Américains et des Français qui ont fait savoir que leurs raids allaient s’étendre vers cette région.
Il semble que le président turc refuse d’en être écarté. Ce jeudi, il a lui aussi affirmé que les opérations militaires turques en Syrie vont s’étendre à Raqqa.
Alors qu’il avait dit dans le passé que les cibles des opérations turques étaient exclusivement Al-Bab et Manbej, sans atteindre Alep. Sans jamais évoquer Raqqa.
Cette précaution verbale convertie avec des efforts apaisants dans la ville d’Alep reflètent sans doute le souci du président turc de ménager les réactions russes, s’efforçant d’éviter toute friction avec leurs forces sur le champ syrien. Un souci qu’il partage avec les occidentaux, semble-t-il. Les raids contre Raqqa sont présentés par les deux acteurs américain et français comme étant dans la continuité de la bataille de Mossoul en Irak. Et non dans celle de s’ingérer en Syrie : ligne rouge russe et syrienne.
La grande absente dans cette offensive franco-américaine et turque en direction de Raqqa n’en demeure pas moins la réaction russe et iranienne. Elle devrait sans doute être exprimée à l’issue d’une rencontre tripartite entre les trois chefs de la diplomatie, russe, iranien et syrien qui vont se rencontrer le vendredi (28 octobre) à Moscou.