L’une des armes les plus précieuses que possédait la résistance islamique durant la guerre de 2006 est le secrétaire général du Hezbollah sayed Hassan Nasrallah. Une arme active, vivante, influente et crédible. Son apparition était attendue aussi bien par l’ennemi que par les alliés et les partisans, ses paroles étaient considérées comme un indicateur en soi permettant d’anticiper ce qui arrivera dans l’avenir. C’est le cas des Israéliens en 2006, et c’est ainsi que le public israélien voit Sayed Nasrallah, parallèlement à la baisse de la crédibilité de ses dirigeants.
Selon les informations qui ont précédé et qui ont suivi la guerre de Juillet 2006, de nombreuses recherches et études au sein de l’administration sécuritaire israélienne et dans de nombreux centres d’études stratégiques, se sont penchées sur l’analyse de la personnalité de sayed Hassan Nasrallah et son caractère charismatique en tant qu’arme destructive aux mains des ennemis, aussi efficace que l’arsenal du Hezbollah.
Une arme de guerre psychologique fondée sur une connaissance de l’ennemi, de ses faiblesses et de ses capacités, parallèlement à la prise de conscience de l’importance de cette guerre et de son efficacité. Cette perception est non pas visée à influencer le public au Liban et dans le monde arabe et musulman seulement mais également le public d’«Israël». Selon la compréhension israélienne cette influence a un effet «passif» qui s’étend par son pouvoir charismatique vers la conscience des israéliens, que ce soit au niveau du public et du leadership politique et militaire.
L’une de ces études, une recherche préparée par le chef d’état-major actuel de l’armée israélienne, Gadi Eizenkot, et présentée en tant que mémoire. Elle a été abordée dans le cadre de l’examen du niveau de compréhension du chef d’état-major du front nord. L’étude publiée fait partie d’une série d’études faites au cours des dernières années, qui se penchent sur la personnalité charismatique de Nasrallah, dans le cadre de la bataille de sensibilisation aux côtés de la bataille militaire des combattants de la résistance. Selon le journal «Yediot Aharonot», cette étude est l’une des caractéristiques remarquables d’Eizenkot en ce qui concerne sa connaissance du Liban et la menace du Hezbollah vis à vis d’«Israël». Cette étude observe et analyse la personnalité du leader ennemi le plus important (Nasrallah), notamment en ce qui concerne sa performance à travers l’analyse de ses discours publics, dans une tentative d’«entrer dans la tête de l’ennemi» selon le journal et l’étude.
Un ennemi amer et le commandant du front Katioucha
Les premiers écrits concernant les paroles de Nasrallah était durant la guerre de juillet 2006, tout en insistant sur le fait que le «phénomène Nasrallah» est apparu bien avant et qu’il s’est gravé dans la conscience collective des Israéliens bien avant la guerre, visiblement marqué dans l’étude publiée une semaine après le cessez-le-feu, dans la revue «septième oeil»(n ° 64 Septembre 2006) spécialisée dans l’analyse des médias et des journaux israéliens. Selon l’auteur, Zvi Bar’el, le commentateur des affaires du Moyen-Orient dans le journal «Haaretz» :
Hassan Nasrallah représente pour les médias israéliens et dans la conscience du public israélien, trois personnalités différentes : un ennemi amer et le commandant du front Katioucha, un expert dans les affaires militaires, et un expert dans la société et l’armée israéliennes. Tout comme les dirigeants et le public libanais et arabe, les dirigeants et le public israéliens, attendaient aussi les discours de Sayed Hassan Nasrallah ainsi que les commentateurs des médias sionistes. (…)
Il semble qu’aucune guerre à l’époque moderne, n’ait eu autant de discours riches en faits et en analyses militaires et politiques comme ceux de Nasrallah et qui ait fait l’objet d’analyse en tant que priorité, pour dénoter les évènements et les développements des prochains jours de guerre.
Dans sa recherche, Harel ajoute que le «phénomène médiatique» de Nasrallah n’aurait pas existé de cette manière et de cette forme, sans l’existence d’une base solide construite au cours des années passées dans les médias israéliens. Nasrallah a mérité le titre de «personne crédible et, par ses paroles il influence des centaines de milliers d’israéliens, et peut-être tout «Israël». Aux yeux de beaucoup, cet homme, est à juste titre, celui qui a chassé les israéliens du Liban et qui a créé une énorme force de dissuasion.
Pour démontrer sa place dans la conscience israélienne, Harel ajoute: «En bref, Nasrallah, pour la première fois a pu briser une règle générale convenue par le public et les médias israéliens: c’est un dirigeant arabe qui ne se vante pas, ne ment pas et prononce des termes précis». Ces qualités ont terrifié le chef des publications médiatiques israéliennes durant la guerre, quand il s’est empressé de limiter les effets des paroles de Nasrallah et de ses discours, et les a soumis à la censure, les considérant comme une arme destructive aux mains de l’ennemi.
Nasrallah est une personne différente des dirigeants arabes
Entre autres, parmi ce qui a été publié en «Israël», au sujet de la guerre de 2006, une étude apparue dans la revue trimestrielle de l’Association israélienne pour les médias («Mskerot médias») – Automne de 2012, sous le titre «l’apparition médiatique de Hassan Nasrallah lors de la deuxième guerre du Liban». Cette recherche s’est penchée sur l’étude des 7 discours de sayed Nasrallah durant la guerre, notamment les messages verbaux et non verbaux, mettant l’accent sur ces derniers vu qu’ils sont les plus influents et les plus touchants pour le destinataire, associés aux expressions du visage, aux mouvements des mains et des yeux, et aux regards ainsi que l’intonation et les termes utilisés qui reflètent la crédibilité et la rigueur et la fermeté et le savoir.
La recherche universitaire, très longue, est remplie de données, de conclusions et de graphes, montrant l’impact et l’efficacité des discours de Nasrallah sur la conscience israélienne, et plus précisément dans la deuxième guerre du Liban, comme une arme efficace ajoutée à la bataille militaire.
Ce qui est remarquable à propos de la recherche, les raisons citées par les auteurs dans son introduction, qui ont transformé Sayed Nasrallah en une figure fiable et crédible vis à vis des israéliens, contrairement aux leaders arabes passés et actuels. L’une de ces raisons est la volonté des médias israéliens, à déformer l’image de Nasrallah à nuire à sa crédibilité et sa position aux yeux du public israélien, ce qui a finalement eu un effet contraire et a renforcé l’image de Nasrallah.
L’effet des apparitions médiatiques audio-visuelles répétées de sayed Nasrallah, et surtout, les mouvements qui accompagnent ses paroles ont renforcé son image, plus tard sa crédibilité s’est renforcée lorsque les événements produits étaient conformes à ses paroles. C’est ce qui s’est passé, avant 2000, durant la guerre 2006, et jusqu’à aujourd’hui.
La recherche dans les nombreuses études israéliennes qui se penchent sur l’image de sayed Nasrallah et son impact sur la conscience israélienne ne se termine pas. Les exemples présentés ici sont tirés d’une recherche publiée en «Israël», bien que beaucoup d’autres n’ont pas été publiés et sont restés dans les institutions et les forums traitant les questions liées à la confrontation permanente entre «Israël» et le Hezbollah, comme les études publiées et discutées dans l’établissement sécuritaire israélien et ses multiples académies.
Se battre contre «Israël» sans feu
L’image de Nasrallah, 18 ans après le retrait du Liban en 2000 et 12 ans après la guerre de 2006, continue de creuser la conscience israélienne, le public, les dirigeants et l’établissement de sécurité. Il est impossible de nier que les chefs à «Tel Aviv sont conscients de ce phénomène et de ses dégâts, et travaillent dur pour réduire son impact négatif, mais entre les plans des israéliens et la réalité de la crédibilité de Nasrallah, il semble bien que Sayed Nasrallah remporte le tour. La plupart des chercheurs stratégiques israéliens qui ont travaillé sur ce phénomène ont tenté de le limiter et ont évoqué la nécessité d’y faire face, mais n’ont jamais développé de stratégies pour le confronter et atteindre l’objectif souhaité dans cette confrontation, malgré toutes les possibilités.
A cet égard, plusieurs articles ont été publiés en Israël et à l’étranger sur le «phénomène de Nasrallah», y compris un extrait, contenu dans un article publié dans le «Newsweek» américain il y a un an (18/10/2017), écrit par le directeur des affaires militaires et stratégiques au Centre national de recherche sur la sécurité à «Tel-Aviv», le colonel Gabi Siboni, qui a étudié la nécessité de «faire face au discours de Nasrallah et son impact négatif sur le public et l’armée israélienne, au temps de guerre ou de trêve». Siboni souligne, la nécessité de mettre en place une stratégie sécuritaire pour renforcer et fortifier le public israélien face aux efforts déployés par le Hezbollah et en particulier son secrétaire général, en tant que partie intégrante des préparatifs aux prochaines confrontations militaires, durant laquelle les «éléments cognitifs» seront dirigé par Nasrallah, avant et au cours de la guerre, et auront un rôle très important dans la confrontation à venir, non moins important que l’effort de guerre en elle.
Siboni confirme ce qu’il appelle «la lutte contre Israël sans feu», dans sa description de la bataille de l’esprit, la bataille sur la perception et l’influence, une caractéristique propre au discours de Nasrallah. Dans ce contexte, le chercheur appelle les chefs de l’entité sioniste à comprendre que l’esprit est devenu une partie intégrante de la bataille du XXIe siècle, et la connaissance en matière de sécurité est maintenant un besoin primordial pour la sécurité nationale.
Les commentaires, les indications et les revendications de Siboni ainsi que son effort à mettre l’accent sur l’importance du phénomène Nasrallah dans son article, et le choix des mots et des termes employés dans son texte, associés à ses connaissances en matière de politique et de stratégies adoptées par l’armée israélienne, tout cela indique clairement et sans équivoque qu’«Israël» jusqu’à présent, 12 ans après la guerre de 2006 , tout en reconnaissant la gravité de l’image de Nasrallah sculpté dans l’esprit israélien, n’a pas encore trouvé de «remède» à ce phénomène et à son impact négatif, en tant que deuxième arme aux mains du Hezbollah, qui se fusionne avec les efforts militaires, avant, pendant et après les combats.
Sources : Article paru dans le quotidien libanais Al-Akhbar ; traduit par Al-Ahed News