L’appel à une manifestation ce samedi 6 juin au Liban dans le cadre du mouvement de protestation qui a éclaté le 17 octobre 2019 semble avoir raté son pari.
Alors que les revendications de ce dernier s’étaient surtout axées autour de la dénonciation et de l’expulsion du pouvoir de la classe politique corrompue qui a causé l’effondrement économique et financier au Liban, cet appel s’est pris pour slogan de réclamer le désarmement de la résistance, sous prétexte de faire appliquer la résolution 1559, voté en 2004 par l’Onu sur le désarmement de « toutes les milices au Liban ».
« Les révolutionnaires de l’ambassade »
Selon le rédacteur en chef du journal al-Akhbar, Ibrahim al-Amine, ce sont les « révolutionnaires de l’ambassade » qui sont derrière ce virage dans les revendications. En allusion aux protagonistes pro américains.
Il s’agirait selon des rapports de presse, des partis suivants : les Kataeb, le Bloc national, Parti 7, les Forces libanaises, le Parti socialiste progressiste du leader Walid Joumblatt.
S’ajoutent aussi les groupes suivants : Beyrouth est ma ville, le Harak de Tripoli dirigé par l’ancien chef de la Sécurité générale Achraf Rifi, des groupes dissidents du courant du Futur, dirigés par Baha Hariri, le fils du défunt Premier ministre Rafic Hariri et frère de l‘ex Premier ministre Saad Hariri, et le groupe « Je suis la ligne rouge ».
Se trouve aussi un groupe formé des parents et proches des prisonniers islamistes qui réclame leur amnistie.
Selon al-Amine, la nouveauté dans ce mouvement est que les États-Unis et leur alliés, en l’occurrence la Grande Bretagne, la France, l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis ont cette fois-ci pressé leurs alliés locaux de passer à l’acte, pour élever le plafond de leur confrontation directe avec le Hezbollah. Leur faisant part que c’est le moment de la vérité, « les Libanais devant choisir le camp de l’opposition directe et explicite au Hezbollah, faute de quoi ils perdront toute la solidarité de la communauté internationale et toutes les opportunités de soutien économique et financier pour faire face à la crise actuelle ».
Rejet de la manifestation
De nombreuses composantes politiques qui avaient fait part aux rassemblements du 17 octobre se sont démarquées de cet appel, et ont choisi de ne pas faire part à la manifestation de ce samedi.
Ce sont : Mouvement des citoyens et citoyennes dans un Etat, Alliance nationale, Vous puez, le mouvement des militaires retraités, le mouvement du Peuple, le parti communiste et des groupes de gauche, le Harak du 17 octobre pour un Etat civil, le groupe des Jeunes de la banque, la Coalition de l’édification de l’Etat et les groupes des rebelles de Tyr, Saida, Nabatiyeh, Kfar Remmane et Baalbek.
Selon ces derniers, les objectifs initiaux du mouvement de protestation du 17 octobre ont été confisqués, notamment les réformes, la récupération de l’argent pillé, la poursuite en justice des corrompus et l’édification d’un Etat civil.
Conscients qu’ils ne seront que minoritaires dans leur appel politisé, le parti des Kataeb, les forces libanaises et d’autres groupes civils ont tenté dans la nuit de vendredi à samedi, d’éviter d’afficher ouvertement vouloir manifester contre l’armement de la résistance, mettant de l’avant qu’ils réclament des élections législatives anticipées, laissant la tache de le faire à des groupes anonymes, révèle le directeur d’al-Akhbar
Ils convoitent entre autre de rallier la communauté sunnite au Liban, avertit al-Amine « au prix même de dissensions sanglantes en son sein ».
A cet égard, le courant du Futur a averti dans la nuit qu’il n’est pas partie prenante dans cette manifestation.
A Tripoli, fief sunnite, un sit-in organisé réclamant l’application de la 1559 a été expulsé de la place Nour sur fond d’escarmouches.
Les partisans de la résistance sont venus
Au centre-ville dans l’après-midi de ce samedi, de petits rassemblements éparses ont été observés, dans les deux places Nejmeh et Chouhadas, et sur le pont du Ring.
D’un côté, il y avait les partisans des partis qui ont appelé à la manifestations. De l’autre, des partisans à l’armement de la résistance étaient présents aussi.
Et au milieu, les forces de l’ordre, dont l’unité anti émeutes des Maghawirs, qui ont empêché leur face-à-face en jetant des gaz lacrymogène de part et d’autre. Le Hezbollah et le mouvement Amal ont demandé à leurs partisans de se retirer.
Des soldats du 3 ème bataillon l’armée libanaise étaient également présents, a constaté le correspondant de la télévision al-Manar. Il a révélé que cette dernière a été informée que des partisans venus de la région de la maison des Kataeb avaient pour ambition de lancer des assauts sur la place de Nejmeh. Ils ont été repoussés directement.Il y aurait eu 9 blessés légers, selon la Croix rouge libanaise.
Le vendredi, l’armée avait démantelé 4 groupes qui voulaient semer la pagaille dans la capitale libanaise, a pour sa part indiqué la télévision libanaise d’information al-Mayadeen.
Les observateurs ont constaté que le nombre des éléments libanais réguliers était nettement supérieur à celui des manifestants, des deux côtés.
La révolution volée par les voyous
Alors que la chaine de télévision saoudienne al-Arabiyat propageait que des manifestations contre l’armement du Hezbollah se déroulaient dans la capitale libanaise, l’humoriste libanais Charbel Khalil tweetait avec ironie :
« A tous les révolutionnaires, prière de descendre immédiatement à la place des martyrs, la manifestation est sur le point de rassembler un million. Il lui manque seulement 999.850. Ne décevez pas vos dirigeants ».
Avant de conclure avec le hashtag : #une révolution –volée- par les voyous
Source: Divers