« Quand nous mangeons ce que nous cultivons et portons ce que nous tissons, nous deviendrons alors un peuple souverain», c’est ce qu’a affirmé, ce mardi 7 juillet, le secrétaire général du Hezbollah, Sayed Hassan Nasrallah, dans un discours sur la crise économique au Liban et la politique d’étouffement exercée par l’administration américaine contre le peuple libanais.
A cet égard, Sayed Nasrallah a annoncé l’engagement total du Hezbollah dans la bataille de « la résistance agricole et industrielle afin de redresser ces deux secteurs et sauver tout le Liban ».
Ailleurs dans son discours, le numéro un du Hezbollah a assuré que les pressions US contre le Hezbollah n’aboutiront pas. « Votre politique d’étouffer le Liban renforcera le Hezbollah et affaiblira vos alliés. De plus, elle poussera le Liban à s’aligner totalement du côté de notre axe ».
Au niveau régional, Sayed Nasrallah a affirmé le soutien du Hezbollah aux Palestiniens dans leur lutte contre le projet israélien de l’annexion de la Cisjordanie et de la vallée du Jourdain.
Voici les principaux points de son discours :
Tout d’abord, avant d’aborder la situation économique et politique au Liban, je voudrais signaler que nous approchons de la commémoration de la guerre israélienne (12 juillet – 14 aout 2006) contre le Liban, et de la libération des Jroud du Liban des takfiristes d’al Nosra et de Daesh.
Situation économique
La situation actuelle nécessite la coopération et les efforts de tous. L’effondrement économique et financier et la famine ne se limitent pas à une région ou à une communauté spécifique, tout les Libanais sont concernés par cette crise. D’où la nécessité de la traiter de façon nationale. Il faut penser à tous les libanais et aux résidents sur le sol libanais, qui seront tous affectés en cas de crise.
Quand nous avons proposé de nous tourner vers l’Est, cela ne signifie pas qu’il faut totalement exclure l’Occident. Il faut coopérer et s’ouvrir à tous les pays, à l’exception d’Israël, qui souhaitent investir ou aider le Liban.
Craintes de s’ouvrir à l’Est
Certains se sont opposés à la proposition de s’ouvrir vers l’Est, prétendant que l’occident et les USA constituent l’oxygène du Liban. Mais qu’allez-vous faire si les USA veulent vous couper l’oxygène ?
D’autres ont émis des craintes quant à une possible modification de l’identité du Liban.
Si la Chine vient investir au Liban, cela ne veut pas dire que nous voulons transformer notre pays en un régime communiste. Il en est de même pour l’Iran. Nous ne voulons pas transformer le Liban en un modèle iranien. L’Iran, qui a résisté et tenu 40 ans face aux pressions et sanctions US, jouit d’une autosuffisance sur les plans industriel, médical, militaire, pétrolier…
Combien économiserait la Banque centrale si nous achetions du carburant iranien en livres libanaises?
Si vous avez peur de nos alliés, alors apportez du carburant et des produits alimentaires de chez vos amis . Nous n’avons aucun problème.
Si la France veut suspendre CEDRE et les USA imposent des sanctions, qu’est ce qu’on fait alors ?
Nous ne pouvons rester les bras croisés en attendant les résultats des négociations du gouvernement avec le Fonds monétaire international (FMI). Il ne faut pas se limiter à une seule option pour sortir de la crise. Nous devons frapper à toutes les portes possibles et chercher d’autres options pour empêcher l’effondrement et prévenir la famine.
Il ne faut pas se résigner aux pressions US et rester passif. Le peuple et l’Etat doivent agir pour parvenir à une solution.
Votre politique d’étouffer le Liban n’aboutira pas
Les Libanais sont menacés par l’effondrement et la faim, d’où la nécessité de transformer la menace en une opportunité. Cette menace pourrait être une occasion pour faire sortir le Liban de l’impasse due aux politiques cumulées et aux pressions US.
Quand la Chine propose de lancer des projets estimés à des milliards de dollars pour aider notre pays, nos responsables doivent prendre l’initiative et entrer en contact avec la direction chinoise pour discuter des projets d’investissement en question. Laissez les dirigeants travailler et contacter les Chinois en ce sens, au lieu de diffuser des rumeurs de toutes sortes, comme par exemple l’indécision chinoise envers le Liban.
Cette possible aide chinoise a suscité le courroux des dirigeants américains, dont Pompeo, Schunker ainsi que de l’ambassadrice US au Liban, qui ont mené une attaque acerbe contre toute ouverture probable envers la Chine. Ceci prouve que le Liban peut se débarrasser de l’emprise US.
Quand on tape sur la porte de la Chine, de l’Irak, de l’Iran et de la Syrie, cela donne de l’espoir aux Libanais et envoie un message fort aux USA: votre politique d’étouffer le Liban n’aboutira pas.
Lancement de la résistance agricole et industrielle
Depuis des décennies, les secteurs agricole et industriel au Liban ont été gravement affectés et souffraient de négligence et de manque de financement, vu que les politiques adoptées privilégiaient le soutien au secteur touristique.
Les politiques étatiques ne subventionnaient pas la production agricole, poussant les agriculteurs à jeter leurs fruits et légumes par terre, vu que leurs couts ne pouvaient pas concurrencer les autres produits au niveau local ou régional.
Si quelqu’un voulait investir dans le secteur agricole ou industriel, il pourrait bénéficier de seulement 5 ou 10 %, alors que s’il met son argent dans la banque et s’assoit sous le climatiseur il gagnera plus que ça. C’est cette politique qui nous a mené à devenir un pays consommateur de premier rang, à point de favoriser l’importation de l’oxygène et de l’eau.
L’une des conditions de vie digne pour un peuple est d’être producteur au niveau agricole et industriel. Pour traiter ce problème et devenir un pays producteur, l’Etat et le peuple doivent assumer leurs responsabilités. Tous les facteurs sont favorables , qu’il s’agisse notamment des terres agricoles disponibles ou du climat ou des capacités hydrauliques. Tout ce qui nous manque, c’est une prise de décision, qui doit également s’appliquer à la production industrielle.
Par rapport au Hezbollah, nous appelons les Libanais à se lancer dans le combat du redressement des secteurs agricole et industriel pour affronter le blocus et la faim. Nous avons pris la décision que c’est la bataille du Liban et de son peuple. Tout le Hezbollah, avec toutes ses capacités, sera au cœur de cette bataille. Nous allons collaborer avec tout le monde pour travailler main dans la main et vaincre la famine. Notre slogan était ces dernières années: Nous serons présents là où nous devons l’être. Aux partisans de la résistance je vous dis que dans la bataille de l’agriculture et de l’industrie, nous serons présents en force. Nous allons tous devenir des cultivateurs pour sauver tout notre pays.
Il s’agit d’une nouvelle période dans notre résistance. Il en est de même pour le secteur industriel. Quand nous mangeons ce que nous cultivons et portons ce que nous tissons, nous deviendrons alors un peuple souverain.
Le 7/7/2020 c’est la date du lancement du jihad ou résistance agricole et industriel.
Ingérence flagrante d’un pays colonisateur
Au niveau politique, je voudrais évoquer l’ingérence flagrante de l’ambassadrice US au Liban, qui se comporte comme un haut commissaire d’un pays colonisateur.
Ces procédures ne sont peut-être pas nouvelles, mais l’inédit c’est qu’elle le fait au vu et au su de tous.
Tout le monde sait qu’elle a menacé de ne pas fournir d’aide financière si une telle personne n’était pas nommée au poste de vice-président de la Banque Centrale. S’agit-il de diplomatie ou d’actes d’un pays colonisateur ?
Un autre exemple sur l’ingérence de cette ambassadrice, quand elle a évoqué le changement du gouvernement actuel et émis des conditions sur la formation du prochain gouvernement. C’est le peuple qui décide si le gouvernement reste ou démissionne, pas l’ambassadrice américaine !
Aussi, quand elle s’en est pris dans les médias à un parti libanais (Hezbollah), qui jouit d’une grande popularité, et proféré à son encontre des accusations infondées, sans que l’Etat ne dise un mot. Le plus dangereux dans tout cela, c’est qu’elle incite les Libanais les uns contre les autres.
C’est dans ce contexte, qu’un juge patriotique et courageux, Mohammad Mazeh, a pris une décision à son encontre, ceci prouve qu’il y a au Liban, des juges courageux, qui osent hausser le ton, dans ces conditions difficiles, face aux agissements US.
Moi personnellement, je suis fier de la position du juge Mazeh et j’appelle le Conseil supérieur de la magistrature à ne pas accepter sa démission.
Les députés du bloc de la Fidélité à la Résistance vont signer une pétition qu’ils transmettront au ministère des Affaires Etrangères pour convoquer l’ambassadrice US et l’appeler à respecter les lois et les normes dictées par la convention des Vienne sur le rôle des diplomates.
Nous appelons l’ambassadrice US à ne pas donner de leçons aux Libanais sur la liberté et la justice. Ton pays est responsable de la mort des millions d’innocents et du pillage des richesses des pays de la région, sans oublier la discrimination raciale exercée contre vos propres citoyens. Ton pays a soutenu Israël dans toutes ses guerres contre le Liban qui ont fait des dizaines de milliers de martyrs et des blessés.
Votre administration est même responsable, selon les aveux de Trump, de la création des groupes takfiristes tels que Daesh.
Un dernier conseil à l’administration US et à l’ambassadrice US au Liban, vous avez ouvert une guerre contre le Liban et vous êtes en train d’exploiter l’échec des politiques économiques cumulées depuis 40 ans afin d’inciter le peuple contre le Hezbollah et l’isoler et l’affaiblir. Mais cela ne passera pas.
Les guerres israéliennes contre le Liban ont échoué, le takfirisme a été vaincu, tous vos efforts ont été avortés. Vos tentatives sont aujourd’hui votre dernier arme. J’aimerai vous conseiller: ne perdez pas votre temps! La politique de sanctions n’aboutira pas et le Hezbollah ne se rendra pas.
J’ai encore un mot à vous dire que vous pouvez l’analyser scientifiquement, ce n’est pas un slogan. La politique de resserrer l’étau, du blocus et des sanctions n’affaiblira pas le Hezbollah mais le renforcera, par contre ce sont vos alliés et votre influence qui seront affaiblis. Les partisans de la Résistance s’attacheront de plus au Hezbollah. Et quant vous pousser le pays à l’effondrement et à la famine, les autres composantes du peuple libanais n’auront d’autres choix que recourir à la résistance et à ses alliés locaux et régionaux. Par votre politique, vous inciter le Liban, tout entier, de s’aligner dans notre axe.
Analysez bien ce que je dis, abandonnez votre politique et ne sanctionnez pas le peuple libanais, parce que vous n’allez pas atteindre vos objectifs. Arrêtez ce jeu, c’est une perte de temps.
Annexion de la Cisjordanie
Au niveau régional, le projet israélien d’annexion des pans de la Cisjordanie est la chose la plus dangereuse qui se passe actuellement au Proche-Orient. Nous avons reçu, hier, un message du chef du Hamas Ismaïl Haniyeh. Notre préoccupation par la crise économique ne doit pas nous faire oublier la cause palestinienne. Et nous devons restés aux côtés de nos frères palestiniens dans leur lutte face à ce complot dangereux, dont les répercussions seront aussi dangereuses sur le Liban que sur tous les pays de la région. Nous sommes prêts à tout pour bloquer et empêcher le plan d’annexion.