Pyongyang a tiré ce mercredi depuis un sous-marin un missile (SLBM) qui a parcouru un demi-millier de kilomètres en direction du Japon, ce qui constitue pour les experts une nette avancée dans les programmes balistiques nord-coréens.
La distance couverte par le projectile, qui a été suivi par l’état-major
interarmée sud-coréen, dépasse de beaucoup celle de précédents missiles SLBM,
qui n’avaient pas dépassé 30 km, ce qui laisse penser que la Corée du Nord a
effectué d’importants progrès techniques.
Une véritable capacité SLBM ferait monter d’un cran la menace nucléaire
nord-coréenne, en ce que Pyongyang pourrait porter sa dissuasion bien au-delà
de la péninsule coréenne.
« Beaucoup de questions se posent quant à cet essai, mais il a certainement
été un succès », a estimé Jeffrey Lewis, directeur du Programme sur la
non-prolifération en Asie orientale à l’Institut Middlebury des études
internationales de Californie.
« Ce système est toujours en développement, mais la Corée du Nord est
clairement en train de faire des progrès », a-t-il poursuivi.
Les résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU interdisent à Pyongyang de
développer son programme balistique, mais la Corée du Nord a multiplié les
essais de missile depuis son quatrième essai nucléaire en janvier.
Séoul a riposté en acceptant le déploiement controversé sur son sol du
bouclier anti-missiles américain THAAD, une décision condamnée par Pékin et
Moscou.
« Parade efficace’ au THAAD
Lewis, lui, a observé que la technologie SLBM serait une « parade
efficace » au THAAD du fait de la capacité des sous-marins à tirer des missiles
« derrière » les radars.
Mercredi, le missile a été tiré depuis un sous-marin croisant en mer du
Japon. Et, ce qui n’était jamais arrivé pour un projectile de cette nature, le
missile est « entré dans la zone d’identification de défense aérienne » (ADIZ) du
Japon, a déclaré le Premier ministre japonais Shinzo Abe, cité par la chaîne
publique nippone NHK.
Cette zone est celle dans laquelle tous les avions doivent s’identifier
auprès des autorités locales.
Abe a dénoncé « une sérieuse menace pour la sécurité du Japon, un acte
irresponsable qui ne peut être toléré », selon des propos rapportés par l’agence
de presse Jiji.
Début août, Pyongyang avait tiré depuis la terre ferme un missile
balistique qui, pour la première fois, s’était abattu dans les eaux japonaises.
L’armée américaine, elle, a dénoncé une « provocation ».
Ce tir intervient dans un contexte déjà très tendu sur la péninsule, après
une série de défections de Nord-Coréens et au surlendemain du déclenchement de
manoeuvres annuelles impliquant 50.000 militaires sud-coréens et 25.000
Américains. L’exercice « Ulchi Freedom » simule sur ordinateur une attaque
nord-coréenne.
Dans son communiqué, l’armée sud-coréenne estime que le nouveau tir de
missile vise à jeter de l’huile sur le feu et représente un « sérieux défi ».
« Nous réagirons avec fermeté et sévérité à toute provocation », ajoute
l’armée sud-coréenne dans son communiqué.
risque de bavure
L’Armée populaire coréenne (KPA) s’est dite « complètement prête à lancer
des frappes préventives de représailles contre toutes les forces offensives
ennemies impliquées ».
Après plusieurs mois de tirs nord-coréens de missiles, certains experts
considèrent que les relations intercoréennes n’ont plus été aussi tendues
depuis les années 1970.
Si Pyongyang est coutumier des menaces, le risque d’une bavure ou d’un
incident involontaire -qui pourrait avoir des conséquences militaires
dramatiques- est plus élevé du fait de la fermeture ces derniers mois de tous
les canaux de communication intercoréenne.
« Nous restons prêts à nous défendre, nous et nos alliés, contre toute
attaque ou provocation », a assuré Gary Ross, porte-parole du centre de
commandement stratégique américain.
Le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi, en visite au Japon où
il participe à des discussions trilatérales avec la Chine et la Corée du Sud, a
également fait part de son inquiétude.
Le chef de la diplomatie japonaise Fumio Kishida doit tenir mercredi des
discussions avec Wang Yi et son homologue sud-coréen Yun Byung-Se.
Le Japon et la Corée du Sud condamnent régulièrement le programme nucléaire
de Pyongyang, et jugent que la Chine ne fait pas assez d’efforts pour ramener
son allié dans le droit chemin.
Source: AFP